DEL’AUNE : L’ART DU FER
par Estelle FRESNEAU, conservatrice du Musée de Pont-Aven.
Du journaliste qu’il était, Del’Aune a préservé le goût de l’engagement. Artiste autodidacte, il cherche depuis dix ans à percer les mystères du fer pour mieux le dompter.
Hormis les expositions temporaires, les rencontres avec le sculpteur se passent nécessairement dans l’atelier, une ancienne saboterie à Montjean, en Mayenne. De la récupération et de l’accumulation de pièces métalliques disparates, naissent des sculptures composites, entre figuration et abstraction. Del’Aune cultive une relation fusionnelle avec le fer et reconnaît n’avoir jamais été tenté par un autre matériau. A l’image de notre artiste, le fer est brut mais malléable.
A partir du désordre des éléments, Del’Aune cherche une harmonie d’ensemble. La cohérence est le fruit d’efforts physiques : découper, marteler et souder la matière pour susciter la forme. Ainsi, ‘ Le Trotteur’ ou ‘ Le Penseur’ -d’hier ou de demain ?- sont composés à partir de plaques découpés dans de vieux chaudrons.
En même temps, Del’Aune puise aux sources de l’art moderne son inspiration. Son séjour de quelques années en Afrique lui a donné le goût des formes dites ‘ primitives’ très jeune. D’ailleurs, dans l’atelier, les masques africains authentiques ou revisités par Del’Aune habitent les lieux de leur puissante expression.
Le sculpteur ne s’encombre pas des scories de l’Histoire de l’Art et oublie volontiers les grands maîtres du passé. Mais l’art nègre, lui, il connaît.
Difficile de conduire Del’Aune sur d’autres voies d’exploration que le fer. L’osmose est telle que ses dernières recherches se rapportent au barbelé comme la ‘ Femme nue qui ne manque pas de piquant ‘. L’armature métallique devient alors prison ou forme qui protège, selon le regard extérieur ou intérieur à l’enveloppe.
L’œuvre de Del’Aune tient aujourd’hui en l’inventaire d’une vingtaine de sculptures monumentales. Le Finistère, le Morbihan, l’Ille-et-Vilaine, le Maine-et-Loire et la Mayenne en sont les dépositaires : citons Pont-Aven où l’artiste a obtenu un premier prix avec un oiseau, l’entreprise Armor-Lux à Quimper, le site d’Ouest-France à Rennes, le centre-ville de Laval... La dernière récompense, un 5e prix de sculpture à la Biennale d’Art contemporain de Florence, en 2005, stimule le souhait de Del’Aune de rendre publique sa création. En cela, l’exposition monographique qui lui est consacrée cet été 2006 à Roscoff dans le Finistère, offre la perspective de nouvelles rencontres avec l’amateur ou le profane. Persuadé d’être toujours un apprenti, Del’Aune est mu par l’angoisse de ceux qui cherchent et ne se félicitent jamais. Alors, attendons l’œuvre en devenir de Del’Aune.
